Réussite 100 % bidonnée au brevet des collèges : bienvenue à "l’école des fans".
SUD vous explique comment on trafique en grandes pompes les pourcentages de réussite du JURY DEPARTEMENTAL DU BREVET. Un collègue a été convoqué à l’Inspection Académique du Rhône mardi 4 Juillet 2006 pour les péréquation des résultats entre académies... ou comment relever d’une petite dizaine de points les taux de réussite au brevet des collèges dans l’académie de Lyon.
Mardi après-midi, inspection académique du Rhône, une trentaine de chefs d’établissement (chefs de centres de correction) sont convoqués par l’IA à 14 heures pour qu’ils expliquent comment s’est déroulé le brevet cette année, pour signaler les dysfonctionnements et surtout pour s’entendre donner les taux de réussite bruts (donc encore non-officiels), résultats merdiques s’il en est (autour de 70%).
Une 1/2 heure plus tard, les 12 pauvres profs (4 par discipline), qui attendaient docilement autour de la machine à café, entrent, s’assoient de l’autre côté de la table, se font engueuler par certains principaux parce que leur entrée est jugée trop bruyante, attendent toujours qu’on leur explique la raison de leur présence, sont assommés de chiffres inintéressants, essaient de décrypter des tableaux illisibles projetés en tout petit à 5 mètres d’eux, font des sourires soumis à l’IA qui s’écoute parler et qui leur glisse au passage des mots gentils du genre "tout le monde sait que les profs sont gagnés par le syndrôme RTT et bâclent les corrections pour partir plus vite en week-end ; il faut qu’on trouve un moyen de sanctionner clairement un certain laxisme ambiant..."
Au bout d’un quart d’heure, les enseignants comprennent : les chefs se sont mis d’accord pour abaisser à 9.2/20 de moyenne l’obtention du brevet, histoire de rehausser un peu le pourcentage de l’académie. Seulement voilà, avec ce bidouillage, le taux de réussite n’est encore que de 80 %, ce qui est inférieur au taux des autres académies.
Nous y voilà : nous (les 12 dindons de la farce) allons examiner en 2 heures 217 cas particuliers d’élèves qui ont obtenu entre 9.1 et 9.2. Les consignes sont claires, en regardant les notes de 4° et 3°, de brevet et les fiches brevet (qu’on remplit en fin d’année), il faut qu’on décide qui, parmi ces 217, mérite d’être repêché. Consigne est donnée de refuser d’emblée, tout de même, un élève qui n’attendrait pas 7/20 de moyenne en contrôle continu sur les classes de 4° et 3°.
Alors nous voilà à regarder les dossiers, à lire "à l’arrache" les fiches brevet pas toujours remplies, à écrire à toute vitesse et en toute subjectivité (euh, pardon, "en notre âme et conscience") : Admis ou Refusé.
Ca y est, on annonce les résultats, l’IA a l’air satisfait, on en repêche 52% , on calcule, on passe d’un taux de réussite de 80% à 81.14%. Trop cool, on atteint enfin un taux de réussite acceptable, le niveau moyen de réussite des autres académies ! Environ 70% au départ, plus de 80% à l’arrivée, c’est magique.
"Péréquation des résultats entre académies" ou comment obtenir officiellement des taux de réussite corrects mais complètement bidonnés.
Donc dites aux élèves qu’il faut 9.2/20 pour obtenir le brevet, et qu’éventuellement, même s’ils n’ont que 9.1, on leur donnera quand même... s’ils sont sages.
Et tout ça veut donc dire aussi que s’il n’y a que 15 à 18 élèves par classe qui ont leur brevet, c’est que tous les autres ont eu moins de 9.1 de moyenne entre leurs deux ans de collège et leur examen. C’est navrant.